ROnan barrot,Proche d’une rétrospective
Du 15 Déc. 2020 au 31 Mai 2021
21 Boulevard du Bouchage, 06000 Nice
QU’EST QUE
PEINDRE ?
Ronan Barrot vu par Éric Vuillard
(Prix Goncourt 2019)
La peinture excède son histoire. Il existe et il n’existe pas de continuité entre Giotto, Le Nain, Braque, et les fonds de grotte peints à l’âge de pierre. La peinture commence avant l’histoire de l’art […]
Quand j’ai découvert la peinture de Ronan Barrot, j’ai aussitôt éprouvé – comme je
l’éprouve aujourd’hui face à ses grands toiles, Étonnement ou Accompagner, face à
leur véhémence sensible, à leur précision insensée – combien ce qui palpitait en elle
était le résultat inespéré de ce geste étrange, inconciliable avec l’efficacité des autres
mouvements du corps, perdu pour le métier, inutile, et relevant essentiellement de
cette veine obscure par laquelle, en traçant, en appliquant des couleurs, en
charbonnant une silhouette, en gravant les traits indécis de notre monde, une forme
parait. Et aussitôt, j’ai eu le sentiment que les toiles de Ronan Barrot étaient l’une
des manifestations les plus convaincantes et les plus éperdues de ce qui, dans tout
art, remonte à son surgissement silencieux.
“Parce qu’il n’omet jamais l’hommage qu’il doit aux maîtres anciens, parce que jamais il ne néglige la mythologie qui a fondé tant de leurs œuvres et dont tant d’artistes contemporains sont de nos jours oublieux, son œuvre en acquiert une dimension aussi puissante que savante.”
Ronan Barrot se reconnaît quelques influences profondes :
Entre autres maîtres, Goya et Courbet, desquels il dérive sa matière, sa lumière, son jeu de la couleur réinventée et sa passion pour le contraste des teintes sombres et claires. Tout à la fois portraitiste, paysagiste et peintre de vanités, tantôt nostalgique, toujours visionnaire, illusionniste parfois, il maîtrise tous les genres, qu’il entremêle avec bravade mais toujours avec justesse. Artiste aussi classique que contemporain, Ronan Barrot détonne, à une époque où l’art se tourne surtout du côté conceptuel. Il possède l’histoire de l’art – et son œuvre en témoigne – jusque dans ses moindres recoins. Artiste que son médium de prédilection, l’huile, ferait rentrer dans la catégorie de l’art « figuratif », il soumet en fait au regardeur, par l’apparent sujet que sa toile traite, une multitude de possibilités d’interprétation, auxquelles pourraient alors s’appliquer les termes « réaliste », « utopique », « surréaliste », voire « abstrait ».
Parce qu’il n’omet jamais l’hommage qu’il doit aux maîtres anciens, parce que jamais il ne néglige la mythologie qui a fondé tant de leurs œuvres et dont tant d’artistes contemporains sont de nos jours oublieux, son œuvre en acquiert une dimension aussi puissante que savante.
Ronan Barrot transfigure le réel qu’il représente :
Dans ses toiles se voient saisis une nuance, une question, un geste. Ses œuvres rayonnent d’une obscurité pénétrante : on y découvre l’urgente nécessité d’ériger la peinture en (ré)action face à la banalité du tout-venant des images. Le trouble originel n’est en pas pour autant banni : Ronan Barrot, au contraire, rend visible avec ses toiles, comme avec leurs titres, un éventail de rumeurs. Ainsi en va-t-il de ses « paysages », glissant d’un point de vue à un autre, comme l’œil dans la lecture d’un livre : sommes-nous face à une vue connue ? Ainsi en va-t-il de ses « batailles » : nous est-il montré une scène légendaire, ou une situation banale ? Ainsi en va-t-il de ses « crânes » : du sein du « Vanity Case » construit pour eux sous les ordres de Thierry de Chirée qui en avait présenté une version durant le Festival d’Avignon de 20017, sont-ils des vanités, des études ou des hommages ? Ou sont-ils nos spectateurs ? Et ses portraits, sont-ils peints d’après modèle, extraits de sa mémoire ou issus de son imaginaire ?
« Le monde est perdu quand on peint. On ne peut pas le recopier. Il faut tout réinventer, tout reconstruire. » Le Figaro 2014
De sa première présentation au Musée Marc Chagall à Nice en 2006 à aujourd’hui, quatorze années se sont écoulées, qui ont vu croître et grandir l’œuvre de Ronan Barrot (un des artistes, selon 21 Contemporary, les plus entiers de sa génération). Attaché et fidèle à la ville de Nice, voici qu’il lui témoigne son affection par une exposition personnelle inaugurant cette nouvelle Galerie. En retour, celle-ci a décidé de présenter le travail du peintre selon l’angle le plus large, proche de celui d’une rétrospective : l’exposition qui y prend place propose une multitude d’œuvres, dont la variété des thèmes, des palettes et des dimensions vont permettre au public de goûter la diversité des accomplissements de l’artiste.
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